PROJET DE LOI 11
Loi sur la sécurité alimentaire locale
Sa Majesté, sur l’avis et avec le consentement de l’Assemblée législative du Nouveau-Brunswick, édicte :
PARTIE 1
OBJET ET INTERPRÉTATION
Objet de la loi
1 La présente loi vise :
a) à renforcer et à assurer une économie de l’alimentation locale durable au Nouveau-Brunswick;
b) à promouvoir l’approvisionnement en aliments locaux au Nouveau-Brunswick;
c) à améliorer la santé des Néo-Brunswickois grâce à un accès plus facile à des aliments locaux qui sont frais;
d) à fournir aux élèves du Nouveau-Brunswick une éducation en matière d’alimentation, d’agriculture et de jardinage.
Définitions
2 Les définitions qui suivent s’appliquent à la présente loi.
« aliments biologiques locaux » Aliments locaux qui satisfont aux Normes canadiennes de certification en agriculture biologique. (local organic food)
« aliments locaux »
a) Les aliments produits ou récoltés au Nouveau-Brunswick;
b) sous réserve des restrictions réglementaires, les aliments et les boissons fabriqués au Nouveau-Brunswick dont les ingrédients ont été produits ou récoltés à 80 % au moins au Nouveau-Brunswick. (local food)
« Conseil » Le Conseil consultatif de la sécurité alimentaire locale prévu à l’article 5. (Council)
« développement durable » Développement qui, tout en répondant aux besoins de l’heure, ne compromet pas la situation des générations futures. (sustainable development)
« éducation en matière d’alimentation, d’agriculture et de jardinage » Programme d’études visant l’appréciation des systèmes alimentaires locaux au moyen d’expériences pédagogiques directes, telles que des dégustations d’aliments locaux, la participation à des jardins scolaires, des programmes de compostage, la préparation d’aliments et des visites de fermes. (food, agriculture, and garden-based education)
« éducation nutritionnelle » Programme d’études visant l’appréciation des systèmes alimentaires locaux sous l’angle notamment des aptitudes à la vie quotidienne en matière d’alimentation et des effets des pratiques de production alimentaire et des choix alimentaires sur la santé, l’environnement et l’économie. (healty food education)
« évaluation de l’alimentation locale » Évaluation des systèmes alimentaires locaux comportant un inventaire des ressources alimentaires disponibles à l’échelle communautaire et une étude sur l’ampleur de la production et de la distribution des aliments locaux, sur les obstacles qui se dressent et sur les possibilités de développement, en vue d’améliorer l’accès aux aliments. (local food assessment)
« ferme » Lieux utilisés en tout ou en partie à des fins agricoles, y compris notamment ceux utilisés aux fins suivantes :
a) la production de plantes en vue de la vente de tout ou partie de ces plantes;
b) la production d’animaux, y compris leur reproduction, leur élevage ou leur engraissement, en vue de la vente de tout ou partie de ces animaux. (farm)
« ministre » Sauf indication contraire du contexte, le ministre de l’Agriculture, de l’Aquaculture et des Pêches ou tout autre membre du Conseil exécutif chargé de l’application de la présente loi. (Minister)
« organisme public »
a) Tout ministère, tout secrétariat ou toute agence de la province du Nouveau-Brunswick, y compris notamment les composantes des services publics énumérées à la partie I de l’annexe I de la Loi relative aux relations de travail dans les services publics;
b) tout organisme, tout conseil, toute société d’État ou toute commission figurant à la partie IV de l’annexe I de la Loi relative aux relations de travail dans les services publics;
c) une régie régionale de la santé au sens de la Loi sur les régies régionales de la santé;
d) un conseil d’éducation de district établi sous le régime de la Loi sur l’éducation;
e) un établissement au sens de la Loi sur l’enseignement et la formation destinés aux adultes;
f) un foyer de soins au sens de la Loi sur les foyers de soins. (public body)
« populations vulnérables » Personnes qui, en raison de circonstances temporaires ou permanentes, telles que leur âge, leur sexe, leur état de santé, leur incapacité ou leur condition socioéconomique, sont :
a) soit dans une position de dépendance par rapport à d’autres personnes;
b) soit plus exposées que la population en général aux risques de souffrir d’une maladie liée au régime alimentaire ou d’une contamination environnementale des sources alimentaires, s’agissant notamment des femmes enceintes, des bébés, des enfants, des femmes, des personnes âgées et des personnes qui ont moins de résistance immunitaire. (vulnerable populations)
« système alimentaire local » Série d’activités et de processus liés à la production, à la transformation, à la distribution et à la consommation des aliments locaux. (local food system)
PARTIE 2
APPLICATION DE LA LOI
Attributions du ministre
3 En tant que responsable de l’application de la présente loi, le ministre :
a) établit un comité interministériel chargé de coordonner l’établissement et la mise en œuvre d’une stratégie de sécurité alimentaire locale pour le Nouveau-Brunswick, comité formé du ministre des Communautés saines et inclusives, du ministre de la Santé, du ministre de l’Éducation et du Développement de la petite enfance et du ministre responsable de la Société d’inclusion économique et sociale;
b) conseille le gouvernement sur les enjeux relatifs aux systèmes alimentaires locaux;
c) élabore les mesures nécessaires pour la réalisation des objets de la présente loi et établit notamment une stratégie et des cibles;
d) élabore des recommandations visant la réalisation des objectifs suivants en matière de système alimentaire :
(i) une augmentation de la production, de la vente et de la consommation d’aliments du Nouveau-Brunswick,
(ii) l’élaboration et la promotion de programmes d’approvisionnement des résidents néo-brunswickois en aliments sains qui sont cultivés et transformés au Nouveau-Brunswick, visant notamment :
(A) un approvisionnement accru du public en produits locaux,
(B) un accès amélioré à des produits alimentaires sains, cultivés au Nouveau-Brunswick, particulièrement pour les populations à faible revenu et vulnérables,
(C) une éducation scolaire en matière d’alimentation et d’agriculture qui fait ressortir la connexion entre l’agriculture, l’alimentation et la santé;
e) dépose à l’Assemblée législative un rapport annuel sur les conclusions du ministre concernant les progrès accomplis et attendus relativement aux systèmes alimentaires locaux dans la province;
f) fait enquête sur les systèmes alimentaires locaux dans la province et recommande des normes à ce sujet;
g) effectue des études et compile des statistiques sur les systèmes alimentaires locaux dans la province pour faire en sorte qu’une bonne base d’information soit disponible pour permettre d’élaborer et de mettre en œuvre des cibles, des programmes et des politiques sous le régime de la présente loi et des règlements.
Accords
4 Le ministre peut conclure des accords qu’il juge appropriés avec des personnes, des entités – dont le Conseil prévu à l’article 5 – et des gouvernements pour l’application de la présente loi.
Conseil consultatif de la sécurité alimentaire locale
5(1) Le ministre crée le Conseil consultatif de la sécurité alimentaire locale.
5(2) Le Conseil est composé de quatorze membres individuels nommés par le ministre en fonction de la répartition suivante :
a) quatre personnes qui travaillent activement en agriculture ou qui représentent des groupements agricoles;
b) une personne qui représente le monde de l’agriculture durable ou biologique;
c) une personne qui représente le monde de l’agriculture urbaine soutenue par la communauté ou le jardinage communautaire;
d) une personne qui représente les agriculteurs immigrants et réfugiés;
e) une personne qui représente le secteur de la distribution alimentaire;
f) une personne qui représente le secteur de la transformation des aliments;
g) une personne qui représente les intérêts des marchés;
h) un fournisseur de soins de santé qui s’occupe de l’obésité et des maladies chroniques, ou une personne qui représente une coalition communautaire qui s’occupe de l’obésité et des maladies chroniques;
i) deux personnes qui représentent les populations à faible revenu ou vulnérables;
j) une personne qui représente une organisation environnementaliste sans but lucratif.
5(3) La mission et les fonctions du Conseil consistent à présenter des recommandations au ministre favorisant la réalisation des objets de la présente loi.
5(4) Le Conseil fournit des conseils au ministre sur tous les aspects de l’économie de l’alimentation locale au -Nouveau-Brunswick, concernant notamment :
a) l’élaboration de la Stratégie de sécurité alimentaire locale du Nouveau-Brunswick;
b) l’évaluation de l’alimentation locale;
c) l’étude des meilleures pratiques et des activités innovantes relatives au système alimentaire local, y compris l’évaluation de la capacité du Nouveau-Brunswick de reproduire ces activités partout dans la province;
d) la mise au point de stratégies visant à faciliter l’accès aux aliments locaux;
e) une collaboration et des communications accrues entre les ministères et les organismes du gouvernement;
f) une collaboration et des communications accrues entre les gouvernements provinciaux et locaux;
g) des accords et des cibles institutionnelles d’approvisionnement.
5(5) Le ministre peut, à la demande du Conseil, créer un ou plusieurs comités consultatifs techniques chargés d’assister le Conseil dans l’exécution des fonctions prévues aux paragraphes (3) et (4).
PARTIE 3
STRATÉGIE DE SÉCURITÉ ALIMENTAIRE LOCALE ET CIBLES
Cibles
6(1) Dans les douze mois suivant l’entrée en vigueur de la présente loi, le ministre, dans le but de favoriser la réalisation des objets de la présente loi et en consultation avec le comité interministériel, le Conseil et les autres groupes et personnes qu’il juge utile de consulter, fixe des cibles relativement à ce qui suit :
a) l’approvisionnement en aliments locaux;
b) la distribution des aliments locaux;
c) l’éducation en matière d’aliments locaux.
6(2) Dans le but de réaliser un ou plusieurs objets de la présente loi, le ministre, après avoir effectué la consultation prévue au paragraphe (1), fixe des cibles qualitatives et quantitatives en matière d’aliments locaux.
Modification des cibles
6(3) Le ministre peut au besoin modifier les cibles qui ont été fixées en application du présent article, après consultation conformément au paragraphe (1).
Stratégie de sécurité alimentaire locale du Nouveau-Brunswick
7(1) Dans les dix-huit mois suivant l’entrée en vigueur de la présente loi, le ministre, en consultation avec le comité interministériel, le Conseil et les autres groupes et personnes qu’il juge utile de consulter, élabore la Stratégie de sécurité alimentaire locale du Nouveau-Brunswick.
Contenu
7(2) À la Stratégie de sécurité alimentaire locale du Nouveau-Brunswick sont intégrés :
a) une vision pour la réalisation des objets de la présente loi;
b) les cibles fixées en application de la présente loi et une explication de la manière dont ces cibles contribuent à la réalisation des objets de la présente loi.
Révision
7(3) La Stratégie de sécurité alimentaire locale du -Nouveau-Brunswick est révisée tous les cinq ans et est modifiée, s’il y a lieu, pour tenir compte des nouvelles cibles et des nouveaux développements au Nouveau-Brunswick en matière de santé, de protection de l’environnement, d’accès et d’éducation relatifs aux aliments locaux.
Rapport quinquennal
7(4) Après avoir consulté le comité interministériel, le Conseil et les autres groupes et personnes qu’il a jugé utile de consulter, le ministre dépose à l’Assemblée législative, à partir du 31 décembre 2020, un rapport quinquennal sur la Stratégie de sécurité alimentaire locale du Nouveau-Brunswick.
Rapports annuels d’étape
7(5) Malgré le paragraphe (4), le ministre dépose des rapports annuels d’étape à l’Assemblée législative à partir du 31 décembre de l’année qui suit l’entrée en vigueur de la présente loi.
Contenu des rapports
7(6) Les rapports mentionnés aux paragraphes (4) et (5) contiennent en particulier, outre les matières jugées utiles par le ministre, une description des mesures prises en soutien à la Stratégie de sécurité alimentaire locale du Nouveau-Brunswick et des progrès accomplis par rapport aux cibles fixées en application de l’article 6.
PARTIE 4
ÉVALUATION DE L’ALIMENTATION LOCALE ET APPROVISIONNEMENT EN ALIMENTS LOCAUX
Évaluation de l’alimentation locale
8 Dans les douze mois suivant l’entrée en vigueur de la présente loi, le ministre entreprend une évaluation de l’alimentation locale comportant :
a) un examen du rendement de base de la production agricole au Nouveau-Brunswick, y compris des données sur :
(i) la quantité d’aliments produits chaque année au Nouveau-Brunswick,
(ii) la quantité d’aliments achetés et consommés par des résidents du Nouveau-Brunswick ainsi que l’ampleur de la transformation, de la distribution et de la mise en marché locales des aliments produits au Nouveau-Brunswick,
(iii) la quantité d’aliments produits au Nouveau-Brunswick qui sont achetés par des organismes publics;
b) les obstacles qui limitent l’accès du secteur de l’alimentation et de l’agriculture à la production, à la distribution et aux marchés de consommation au -Nouveau-Brunswick.
Approvisionnement en aliments locaux
9(1) Le ministre commande aux organismes publics d’augmenter chaque année la part de leur budget alimentaire consacrée à des aliments locaux ou à des aliments biologiques locaux jusqu’à ce que ces aliments représentent une part importante de leur budget alimentaire global en fonction des cibles fixées.
9(2) Dans le but d’atteindre les objectifs énoncés au présent article, lorsque des aliments locaux ou des aliments biologiques locaux contribuent à la sécurité alimentaire locale et au développement durable au Nouveau-Brunswick, les organismes publics peuvent conclure des contrats d’achat d’aliments qui privilégient des soumissionnaires admissibles offrant ce type d’aliments, à condition que le coût additionnel qui en découle ne dépasse pas les 10 %.
Approvisionnements assujettis aux accords commerciaux
9(3) Le présent article ne s’applique pas aux approvisionnements qui enfreindraient des accords commerciaux nationaux ou internationaux auxquels le Nouveau-Brunswick est tenu par entente avec le Canada.
PARTIE 5
ÉTIQUETAGE DES ALIMENTS PRODUITS ET TRANSFORMÉS LOCALEMENT
Étiquetage
10 Le ministre établit, en consultation avec le Conseil, un système d’étiquetage pour les aliments produits et transformés au Nouveau-Brunswick.
PARTIE 6
ÉDUCATION NUTRITIONNELLE DANS LES ÉCOLES
Définition
11 Dans la présente partie, « ministres » s’entend du ministre de l’Agriculture, de l’Aquaculture et des Pêches, du ministre de l’Éducation et du Développement de la petite enfance, du ministre de la Santé et du ministre des Communautés saines et inclusives.
Éducation en matière d’alimentation, d’agriculture et de jardinage
12 Les ministres encouragent l’éducation en matière d’alimentation, d’agriculture et de jardinage dans toutes les écoles, à partir de la maternelle jusqu’à la douzième année.
Perfectionnement professionnel des enseignants et du personnel d’éducation
13(1) Les ministres aident les écoles et les conseils d’éducation de district à incorporer l’éducation en matière d’alimentation, d’agriculture et de jardinage à leur programme d’études et à élaborer des programmes de perfectionnement professionnel connexes à l’intention des enseignants et du personnel d’éducation.
Information
13(2) Les ministres fournissent de l’information aux écoles sur la façon dont la politique sur l’éducation nutritionnelle facilitera la mise en œuvre des directives et politiques du ministère de l’Éducation et du Développement de la petite enfance relatives au programme d’études.
Perfectionnement professionnel
13(3) Le perfectionnement professionnel offert par le ministère de l’Éducation et du Développement de la petite enfance doit informer les enseignants et le personnel d’éducation sur la façon d’enseigner l’éducation nutritionnelle tout en donnant la chance aux élèves d’acquérir des connaissances en matière d’alimentation, d’agriculture et de jardinage.
PARTIE 7
INFRACTIONS ET PEINES
Infractions
14 Est coupable d’une infraction tout organisme public qui contrevient à une directive donnée en application du paragraphe 9(1).
Peines
15(1) Un organisme public qui est déclaré coupable d’une infraction prévue à l’article 14 est passible :
a) la première fois, d’une amende maximale de 5 000 $ pour chaque jour ou partie de jour pendant lequel l’infraction est commise ou se poursuit;
b) en cas de récidive, d’une amende maximale de 10 000 $ pour chaque jour ou partie de jour pendant lequel l’infraction est commise ou se poursuit.
Délai de prescription
15(2) Toute instance intentée sous le régime du présent article se prescrit par un délai de deux ans à compter du plus récent des événements suivants :
a) la commission de l’infraction;
b) la prise de connaissance par le ministre des faits indicatifs de l’infraction.
Conflit de lois
16 En cas de conflit entre la présente loi ou ses règlements d’application et une disposition d’une autre loi, d’un autre règlement ou d’un arrêté municipal relative à l’alimentation locale, à l’éducation nutritionnelle, aux aliments biologiques ou encore à la production, à l’approvisionnement ou à la distribution alimentaires, la disposition qui offre la meilleure protection à la santé humaine ou à l’environnement l’emporte.
PARTIE 8
RÈGLEMENTS ET ENTRÉE EN VIGUEUR
Règlements
17 Le lieutenant-gouverneur en conseil peut par règlement :
a) clarifier les définitions énumérées à l’article 2;
b) réglementer et clarifier les attributions du ministre prévues à l’article 3;
c) réglementer le contenu des accords prévus à l’article 4;
d) réglementer la gestion et le fonctionnement du Conseil régi par l’article 5;
e) réglementer l’élaboration des cibles régies par l’article 6;
f) réglementer l’élaboration de la stratégie prévue à l’article 7;
g) réglementer l’élaboration des évaluations de l’alimentation locale prévues à l’article 8;
h) réglementer l’imposition, l’élaboration et la mise en œuvre des mesures d’approvisionnement en aliments locaux prévues à l’article 9;
i) réglementer l’élaboration et la mise en œuvre du système d’étiquetage prévu à l’article 10 pour les aliments produits et transformés au Nouveau-Brunswick;
j) réglementer l’élaboration des programmes d’enseignement et de perfectionnement professionnel prévus aux articles 12 et 13;
k) régler toute autre question qu’il juge nécessaire ou souhaitable de régler pour l’application de la présente loi.
Entrée en vigueur
18 La présente loi ou l’une quelconque de ses dispositions entre en vigueur à la date ou aux dates fixées par proclamation.